Selon l’institut national, la récession en 2020 marquera au final un recul de 9% du PIB par rapport à 2019 avec un chômage atteignant 9,5% de la population active à la fin de l’année. Le rebond attendu devrait s’atténuer en fin d’année estime l’organisme statistique.
Après le choc du confinement, l’économie française vue à travers le prisme statistique de l’Insee se remet sûrement mais tout doucement.
L’organisme public fait état d’une poursuite du rebond de l’activité cet été mais à un rythme un peu moindre qu’à la fin du printemps. Au mois d’août, l’économie aurait ainsi fonctionné à 95% de son niveau d’avant-crise après un confinement qui a vu tourner l’économie française à un peu plus de la moitié de ses capacités. En juin, l’activité avait atteint 91% de son niveau de la fin 2019 et en juillet 93%. Le retour à la normale prendra du temps puisque l’Insee prévoit qu’au quatrième trimestre, ce niveau d’activité atteindra 96%. Ce que l’on appelle une reprise très poussive.
Un recul de 9% de l’activité en 2020
La chute historique de 13,8% du produit intérieur brut (PIB) au deuxième trimestre devrait donner lieu à un rebond mécanique au troisième de +17%, un peu inférieur au +19% auparavant anticipé. Ensuite, la croissance ne sera que de 1% au quatrième trimestre. Au total et sur l’ensemble de l’année 2020, le PIB de la France reculerait d’environ 9%, prévoit l’Insee, soit une légère amélioration par rapport à la prévision du gouvernement qui tablait sur -11% avant l’été. Le ministre de l’Economie Bruno Le Maire a déjà indiqué qu’il reverrait sans doute à la baisse cette estimation d’ici la présentation du budget 2021 fin septembre. «Certes, le recul du PIB au deuxième trimestre a été moins marqué qu’anticipé initialement, mais l’incertitude sanitaire tend à croître de nouveau et nous conduit à tempérer le rythme prévu pour la poursuite de la reprise», estime l’organisme statistique.
Quant au chômage, il devrait grimper autour de 9,5% selon l’Insee, soit 1,4 point de plus qu’un an plus tôt, après une perte de 715 000 emplois sur le seul premier semestre. Alors que l’emploi dans certaines activités comme le tourisme, les transports ou l’événementiel va demeurer très affecté par l’épidémie, d’autres secteurs rebondissent comme la construction, ce qui se traduira pour le second semestre par une quasi-stabilité de l’emploi salarié, avec un fort recours au travail intérimaire. Au second trimestre, l’interim a ainsi progressé de 23% par rapport au trimestre précédent (+108 100 emplois), après une chute inédite de 40,4% au premier trimestre. Autre caractéristique, l’activité partielle et le «sous-emploi» vont demeurer anormalement élevés. Selon la Dares (la direction des études du ministère du travail), le chômage partiel concernait encore 2,4 millions de salariés en juillet, soit un peu moins de 15% des salariés du privé. A partir du 1er octobre, la prise en charge par l’Etat sera moins avantageuse pour les entreprises et les salariés, passant de 84% à 72% du salaire brut.
Un risque de «choc de demande»
L’Insee souligne aussi «le risque d’un choc significatif de demande. Les entreprises sont nombreuses à craindre des pertes de débouchés», est-il écrit dans la note avec une consommation qui resterait atone du fait d’une confiance des ménages toujours inférieure à son niveau d’avant crise. Cette dernière se reflète notamment dans le montant des transactions par carte bancaire : depuis la fin du confinement, elles se sont globalement situées au niveau de 2019 et sont même devenues supérieures à partir de la mi-juillet. Mais pas de quoi cependant rattraper les 100 milliards d’épargne forcée par les Français depuis le début de la pandémie avec un taux d’épargne des ménages remonté au niveau record de 27,4% quand il n’était que de 14,9% en 2019.
Le soutien d’urgence massif mis en place par le gouvernement depuis le début de la crise (déjà 470 milliards d’euros engagés), ainsi que les premiers effets à venir du plan de relance – même si l’Insee les attend surtout en 2021 – doivent contribuer à la reprise avec l’injection de l’équivalent de quatre points de PIB dans l’économie d’ici à la fin 2021.
Le gouvernement qui vient d’annoncer un plan de relance de 100 milliards d’euros surtout centré sur l’offre fait le pari que cela incitera les entreprises à investir et permettra de créer jusqu’à 160 000 emplois d’ici la fin 2021 comme l’a indiqué le Premier ministre Jean Castex lors de la présentation du plan. L’exécutif a pour cela opté pour une baisse massive des impôts pour les entreprises (-20 milliards d’euros), des mesures d’aides à l’embauche, en particulier des 750 000 jeunes qui arrivent chaque année sur le marché du travail, et un soutien aux investissements dans la transition écologique (30 milliards d’euros).
Au final, résume bien l’Insee, l’économie française aborde la rentrée comme un moteur qui serait «tout à la fois bridé et dopé». Autrement dit incapable de repartir au même rythme qu’avant la Covid-19 en raison des incertitudes sanitaires qui demeurent mais bénéficiant d’un amortisseur public puissant et même jamais vu grâce au soutien des politiques budgétaire et monétaire. Des mesures de soutien dont l’ampleur a déjà permis d’amortir en partie le choc récessif de la pandémie comme l’illustre la situation du deuxième trimestre. Alors que l’activité économique a baissé au total de près de 14% sur la période, les revenus des ménages n’ont diminué «que» d’un peu plus de 2% grâce au soutien de différents dispositifs comme l’activité partielle.
source:liberation