Avec la crise sanitaire, les géants des technologies ont accentué leur domination sur une économie américaine en plein marasme.
Aaron Levie, l’une des figures de la Silicon Valley, s’en étonnait début mai. « En 2020, on continue à parler de ce qui devait changer le monde en 2000 : les visioconférences, la fin du papier, le commerce en ligne. La différence est qu’il y a maintenant “un impératif à le faire ”, insiste le PDG de Box, une société de logiciels dématérialisés qui a vu la demande de services sur le cloud exploser. « Et la technologie est finalement prête », conclut-il.
La Silicon Valley était en quelque sorte préparée au virus. Dès les premiers cas de contamination, elle a renvoyé ses salariés chez eux. Deux mois et demi plus tard, elle fait figure de dernier pilier – avec le dollar – d’un modèle américain ébranlé.
Plus question de s’effrayer de l’addiction aux écrans ; les réseaux sociaux ont redoré leur blason. Un sondage publié le 10 mars par la Knight Foundation et Gallup indiquait que, pour 47 % des Américains, les entreprises technologiques créaient « plus de problèmes qu’elles n’en résolv[ai]ent » (15 % seulement se prononçaient pour l’inverse). Mais, depuis le confinement, on les plébiscite. L’écran, c’est l’« apéro visio », les « story-time »avec les grands-parents interdits de visite, l’amplification de la voix des personnels soignants plutôt que de celle des provocateurs. « L’Internet est-il redevenu gentil ? », s’interrogeait le New York Times le 1er avril.
De Netflix à Amazon, les géants des technologies ont accentué leur domination sur l’économie. Non seulement la pandémie leur a donné raison, mais la transition s’est accélérée. Il n’est pas sûr que les consommateurs vont retourner dans les malls ou les multiplex de cinémas. Soixante-huit pour cent d’entre eux indiquent qu’ils éviteront les voyages non essentiels, même dans le monde d’après, selon un sondage Harris Poll. Les changements vont être « significatifs et durables », prévoit Sundar Pichai, le PDG de Google.